Petit rappel sur le libéralisme

Le libéralisme contre la droite

L’on dira qu’une réflexion de cette espèce est subsidiaire. Elle est en réalité primordiale parce qu’empreinte d’un désir passionné de cohésion intellectuelle et philosophique. Revenir à droite est un enjeu politique extraordinaire, en ce sens que si chacun au cœur de ce que l’on nomme trivialement la droite nationale s’entend sur l’amour nécessaire de la patrie, il est moins évident pour ses militants de s’accorder sur la manifestation de l’engagement politique, celui-ci embrassant des formes diverses, sur le terrain de l’action militante évidemment, mais aussi, de manière plus dissimulée à travers les enracinements philosophiques des uns et des autres.

Notre rédacteur en chef a longuement discuté de la droite dans de nombreux et riches articles de fond, auxquels je convie chaque lecteur affamé. Il semble cependant de toute importance de rappeler encore le caractère fondamentalement hostile au libéralisme de la droite authentique.

Il nous faut évoquer l’avènement du système des partis. La Première Restauration, le retour de Napoléon et les Cent-Jours jouent le rôle d’une vitrine référentielle admirable quant au classement des doctrines politiques sur un clivage gauche-droite : c’est de la post-révolution immédiate à 1848 qu’elles s’enracineront dans l’hémicycle. À gauche s’identifient les jacobins, les républicains, les bonapartistes, les libéraux, les démocrates-socialistes. Ils souscrivent notamment à l’heure de la rédaction de l’acte additionnel aux constitutions de l’Empire du 22 avril 1815 au refus d’annulation de vente des biens de l’Église ou à la réaffirmation de la libre expression de la presse. À droite se rassemblent les conservateurs – pour majorité des réactionnaires – et le désir de « clore l’ère des révolutions » selon le mot du Parti de l’Ordre, animés par les monarchistes et les tocquevilliens. Les clivages, en France, se figent peu à peu, et tous revendiquent un patriotisme exclusif, l’un en rupture avec l’ordre ancien, l’autre enraciné dans les antiques traditions. L’un fit ses preuves dans les siècles, l’autre, le patriotisme révolutionnaire, préparait déjà la société moderne tant combattue. Une question demeure : existe-t-il une unique façon d’aimer ? Assurément non, mais la fidélité, elle, n’est pas plurielle ou polysémique. Elle est une, résumée en un don total, inconditionnel, humble et respectueux de ce qui est et a été.

4hrf03i01z-ff5ee

           Louis XVI devant la Convention en décembre 1792 – Gravure de Miller                                

Les horizons se font dès lors épars dans la nébuleuse que le terme « patriote » qualifie vraisemblablement de manière la plus large. Les uns étaient hier réactionnaires, les autres radicaux-socialistes, on peut penser que ce diptyque perdure. Si la bannière tricolore flotte presque unanimement au-dessus de nous, y compris dans les défilés les plus contre-révolutionnaires à condition qu’elle arbore le Divin Cœur, force est de dire que ce n’est pas toujours pour les mêmes et bonnes raisons. Car, enfin, qui comparera Garat à Malesherbes, Barère à Sèze ? Combien les idéologies sont néfastes ! Charette prévenait alors du danger que représentent les hommes dont la patrie est dans la tête plutôt que sous leurs pieds. La patrie est le pays des pères, pas une construction intellectuelle. Des patriotes aiment des idées, d’autres aiment un pays, encore aujourd’hui. Ici, la sémantique trouve une place de choix. Révolution, réaction, égalité, équité, laïcité, catholicité, Locke, Blanc de Saint-Bonnet. Ces notions formellement opposées les unes aux autres n’en demeurent pas moins embrassées par l’ensemble des patriotes, et irriguent de substantielles dissensions qui se résorberont ou par un bras de fer dont on sait que les dégâts sont toujours grands, ou par une prise de conscience massive et une adhésion collective à l’acception première de ce qu’est être de droite depuis l’avènement du système des partis : le consentement à se faire réactionnaire, contre-révolutionnaire savant, que Maistre définit comme le combat pour le contraire d’une révolution, non pour une révolution contraire. Un mauvais arbre ne donne jamais de bon fruit.

Plus avant, dans son Tableau contrasté des idées de droite et de gauche, Jacques du Perron met en exergue trois pistes de réflexion : la philosophie, la politique, le social, où droite et gauche se séparent sans compromis. Être de droite, c’est avant tout le triomphe de la spiritualité sur la matérialité, le combat de la transcendance contre le fatalisme de l’immanence. Plus précisément, la primauté d’un sain holisme, soumission régénératrice à une norme supérieure à l’homme, sur l’individualisme libéral, l’édification d’un État organique contre une organisation rationnelle et légaliste, la voie des libertés concrètes et tangibles qu’une nature donne plutôt que la déification de la liberté comme finalité, l’ascétisme salvateur contre un productivisme mortifère, le sens de l’héroïsme et du devoir bien rempli contre l’hédonisme et la quête des plaisirs.

Être de droite, c’est être le guerrier de l’absolu contre le bourgeois des biens qui passent. Un homme intégral contre les désintégrés de l’autodétermination et des errances du monde. Un guerrier pétri de principes cohérents entre eux, ne pouvant souffrir longtemps, à moins de disparaître, des multiples incohérences et ruptures doctrinaires aujourd’hui inhérentes au camp des patriotes, les dégâts s’accumulant dans un fracas et un gâchis regrettable. Lisons un peu, accordons nos violons sur les pavés et dans nos esprits, et préparons enfin un dernier bal à ceux d’en face.

lysenfleur

5 réflexions sur “Petit rappel sur le libéralisme

    • Cependant, il n’en reste pas moins juste. Par le passé, libéraux et socialistes ont longtemps été des compagnons de route, s’épaulant, entre autres, pour rejeter les lois sociales proposées par les royalistes. Aujourd’hui encore, ils s’entendent comme larrons en foire dès lors qu’il s’agit de torpiller le peu qui reste de la société décente qui fut la nôtre. Les libéraux ont soutenu le projet de loi instituant le mariage pour les invertis, ils sont également pour la PMA et la GPA, le suicide assisté, et bon nombre verraient d’un bon œil la légalisation des drogues (même Madelin s’y est mis).

      J’aime

        • Vous confondez libéraux et capitalistes de connivence.

          C’est classique… En France il n’y a pas de libéraux (hormis peut être Madelin, et encore c’est à nuancer) mais beaucoup, beaucoup de capitalistes de connivence.

          J’aime

      •  » Les libéraux ont soutenu le projet de loi instituant le mariage pour les invertis, ils sont également pour la PMA et la GPA »

        c’est faux. Vous confondez libéraux et libertaire. Cela ne m’étonne pas. La France, patrie du libéralisme (avec Tocqueville notamment) a rapidement renier cette engeance après l’instauration de l’Etat républicain.

        De plus, mettre tous les libéraux dans un même panier est ridicule et intellectuellement malhonnête.
        Il y a tellement de courant dans le libéralisme que les amalgamer est signe d’inculture sur ce sujet.

        Le seul sujet sur lequel ils se rejoignent c’est sur la nocivité de l’Etat gros et puissant. Depuis qu’en France, les socialistes et les ceux qui se revendiquent « de droite » sont aussi étatiste, ils ont par définition anti-libéraux.

        Pour le reste, vous avez pour le mariage, d’autre contre. Vous avez pour la GPA, d’autre contre. Vous avez pour la drogue, d’autres contre etc…

        L’individualisme libéral… quel bel exemple d’ignorance. Les libéraux sont pour la responsabilité individuel. ce qui n’a rien à voir avec l’individualisme. La responsabilité individuelle ne s’oppose absolument pas à la solidarité ou au patriotisme par exemple.

        C’est marrant vous qui défendez le royalisme contre tous les préjugés que cette forme de régime peut suscité vous employez exactement les mêmes principes et méthodes que vos adversaires.

        Les « libéraux » que je peux côtoyer ne ressemblent en rien à ce que vous décrivez. Ils sont patriotes, très attachés à la France et aux valeurs familiales, souvent chrétiens (par forcément très pratiquant, c’est vrai) sont totalement contre la GPA et trouve que le mariage gay est un gadget sociétal ridicule etc…

        Évitez les amalgames de ce genre cela nuit à votre argumentation.

        J’aime

Laisser un commentaire